Suivons François sur la trace d’un sapin d’exception du Vercors…
« Cela faisait maintenant trois fois que j’entendais parler de ce sapin-là. »
« La première, celle par laquelle j’ai pris connaissance de son existence, ce fut avec la lecture du fascicule de la FRAPNA iséroise (Fédération Rhône-Alpes pour la Protection de la Nature), fascicule intitulé « De feuilles en aiguilles » et recensant les arbres remarquables du département. La fois suivante venait d’une discussion avec mon ami Pascal, professionnel des livres de montagne, et qui connait comme sa poche tous ces flancs du Vercors et leurs particularités. Lorsque je lui ai donc demandé s’il connaissait un gros arbre, quelque part, ce fut vers ce sapin qu’il m’orienta de suite. Et la troisième fois, ce fut tout récemment, par Sisley qui, fournissant un lien vers la liste établie par zamalban [1], me fit réaliser que cet arbre, répertorié sous l’appellation de « seigneur de Sallanchon », ne pouvait qu’être un balèze ! »
« Ces mots-là, on ne peut plus flatteurs, finirent de me convaincre que la balade était incontournable : il me fallait aller voir ce sapin ! »
« La voiture est à garer à quelques kilomètres de Gresse-en-Vercors. Une large piste forestière remonte à flanc de vallée, traversant une magnifique sapinière. Ici, beaucoup de spécimens dépassent les 30 mètres de hauteur même si leurs troncs ne sont pas tous forcement gros. Mais ce spectacle est ébouriffant, et je me suis régalé tout au long de cette randonnée ! Un premier sapin remarquable se présente, qui fait 3,55 mètres de circonférence. Il est vraiment beau mais ce n’est pas encore le bon. »
« En bordure de la piste, de nombreuses souches ont été laissées par les exploitants forestiers. Leurs coupes sont franches et propres et je ne me prive pas de procéder au comptage des cernes sur plusieurs d’entre elles, dont une avec 213 cernes [2]. Sur un premier échantillon de ces souches l’épaisseur moyenne des cernes se situe à 0,18 cm, valeur qui est bien faible. En observant ces lieux de plus près, une remarque s’impose : ces anciens arbres étaient tous dans des travers pentus, loin du moindre ruisseau et peut-être ont-ils souffert de cet emplacement médiocre et leur croissance en a-t-elle été ralentie ? »
« Plus loin, par contre, d’autres souches placées proche du fond d’un vallon, donc avec de l’eau facilement accessible, donnent une moyenne de 0,29 cm par cerne. Sans en faire une conclusion scientifique, je garde à l’esprit ces constatations. »
« Il faut marcher une bonne heure pour atteindre le colosse, et le chemin semble d’ailleurs avoir été tracé pour passer justement à son pied. Là, le spectacle ne déçoit pas. »
« Vraiment, ce sapin est d’une catégorie au-dessus, dans cette forêt, et son tronc est franchement plus gros que tous les autres. »
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« La circonférence est difficile à mesurer tout seul, car le talus aval, très raide, rend l’opération malcommode et placer le ruban à l’horizontale a demandé bon nombre de réglages… Le résultat donne 5,00 m à 1,50 m du sol. C’est magnifique ! Il faut noter, histoire de donner l’échelle, que le panneau en bois donnant les informations sur l’arbre fait presque 2,40 de haut. Pour mesurer sa hauteur, cela est encore plus compliqué à faire et je ne peux pas y arriver. Nous en resterons aux 40 mètres annoncés, qui ont d’ailleurs toutes les raisons d’être exacts. Cinquante centimètre sous le ruban, je constate un ancien marquage de peinture rouge (visible sur la photo), mais sans pouvoir m’en expliquer l’utilité… Reprenant le chiffre des 0,29 cm par cerne et les 5 mètres de circonférence, un petit calcul donne 275 ans d’âge pour cet arbre, ce qui ramène donc le seigneur de Sallanchon à l’année 1740, et recoupe parfaitement l’information inscrite sur le panneau. »
« Bien content d’arriver à corroborer toutes mes mesures… ! »

« Après un bon moment passé là, force est de repartir. Et je ne peux me décider à m’en aller qu’en me promettant d’y revenir, afin de continuer à fouiller cette si belle et accueillante forêt. Et de découvrir alors, peut-être, d’autres merveilles ! »
Décidément tu te spécialises en sapins d’exception [3], merci pour cette nouvelle découverte François ! Très beau spécimen, bien droit avec un très bel enracinement à flanc de talus. Une circonférence qui traduit un âge déjà bien avancé, et encore une fois tes mesures de cernes sur les souches trouvées alentours nous fournissent des renseignements précieux. C’est vraiment chouette de te suivre dans tes excursions et de découvrir tous ces trésors cachés de l’Isère.
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