Filons outre-Rhin avec Sisley à la rencontre d’un pin sylvestre d’exception.
« Ça faisait longtemps que je n’ai plus envoyé d’article présentant un arbre que j’ai découvert et pour y remédier, je vous emmène faire un petit crochet par une forêt des Vosges du nord, du côté allemand. Alors que je feuilletais un livre sur les arbres remarquables d’Allemagne [1], je m’arrêtai sur un spécimen très caractéristique, par la suite, revenant de Francfort avec mon frère on en profita pour quitter la route principale et rendre une petite visite surprise à un individu nommé localement le « pin des sorcières », un magnifique pin sylvestre. »
« Une fois sur place, ce fut difficile de s’y retrouver, car le plan m’aidant, n’était pas tout à fait en correspondance avec un panneau indicateur à l’entrée du sentier. C’est après une demie heure de vadrouille, qu’on pu enfin distinguer un énorme houppier dépassant de la ligne du chemin. Je pensais qu’on s’était carrément trompé de direction ou même pire que l’arbre en question n’existait plus, alors quand on le vit nettement, la joie fut au rendez-vous ! »
« J’avais de par le passé pu admirer de très grand pins en Moselle-Est, mais aucun ne possédait une fourche et un volume tel que celui qui va être présenté. Ce qui sautait aux yeux c’était une imposante trace que la foudre avait laissé sur le tronc comme une entaille s’étirant sur plusieurs mètres et présentant une profondeur rarement observée. Mais heureusement ce dommage ne semble pas avoir nuit à la vitalité du pin. »
« La base de l’arbre fait penser à un double tronc sorti d’une seule souche, mais tout compte fait, il est beaucoup plus probable que ce ne soit qu’un seul et même individu. »
« Pour ce qui est des dimensions, je ne vous cacherai pas mon étonnement en voyant s’arrêter mon ruban sur ce chiffre : 5,10 m de tour pour l’ensemble du tronc et 3,75 m pour la circonférence en bas de l’axe de la fourche le plus gros. »
« La hauteur fut estimé entre 25 et 30 m, ce qui est plutôt commun dans ces forêts, mais une telle circonférence en fait l’un ou le plus large du pays voir même du continent, car on en trouve des fois en cépée avec des belles dimensions, mais avec un tronc unique je doute qu’on dépasse souvent les 5 m. En Écosse il en existe un de 6,09 m, mais je ne connais pas la structure du tronc… »
« Il est commun d’en voir possédant des diamètres allant de 50 cm à 75 cm, plus rares, de 80 cm à 1 m et épisodiques, ceux supérieurs à 1 m, car malgré tout, c’est une essence largement exploitée pour du bois de tranchage et en voir un ayant un diamètre de 1,62 m, nous montre à quel point un arbre de ce rang est une chose remarquable. Il doit certainement son salut à sa constitution, n’intéressant pas les exploitants ; l’origine de son appellation ne m’en apprend guère plus, ce pourrait-il que tels les chênes des sorcières [2], on lui attribua des rites de sabbat ? »