Couple de hêtres, Vaulion (Suisse)

L’an passé pour  illustrer un conte sur des arbres qui parlent [1], j’avais utilisé une photo trouvée sur le net ; comme il s’agissait d’un couple de hêtres à l’allure plutôt imposante, je l’avais signalé à plusieurs contacts en espérant un jour obtenir quelques clichés…

Ça a éveillé la curiosité de Loïc qui s’est rendu auprès de ces vénérables.

« Suite à une photo que tu as publié sur la page Facebook des arbres remarquables de Suisse [2], je suis allé à la rencontre de ces deux hêtres isolés au beau milieu d’un pâturage à environ 1200m d’altitude au dessus de la commune de Vaulion dans le canton de Vaud. »

« Une atmosphère humide et brumeuse nous a démontré que la situation de ce couple de vénérables survit depuis bien longtemps dans un milieu plutôt rude. »

« Au premier contact, on se fait la réflexion que ces sujets sont en bien mauvais état (nombreuses branches sèches…) mais en les regardant de plus près, on comprend vite qu’en plein couloir de bise (vent glacial venant du nord et pouvant être régulièrement tempétueux) la moitié de ces deux arbres souffre pour protéger l’autre moitié. »

« D’une hauteur d’environ 15 mètres, la circonférence est difficilement mesurable à cause de nombreuses branches qui partent du bas… D’ailleurs en voyant certaines branchent qui se sont soudées dans la couronne, on peut se demander si le sujet le plus gros des deux n’est pas un ensemble de troncs qui se sont unis pour survivre dans cet environnement hostile… »

« Encore merci pour la piste ! »

Et bien en fait, c’est nous qui te remercions pour ce reportage Loïc !

Je suis vraiment content de pouvoir découvrir plus en détail ce couple de hêtres. Ils sont bien plus imposants que je ne l’avais imaginé au départ, deux fiers colosses âgés qui luttent pour survivre aux dures conditions climatiques de ce pâturage d’altitude. Très beau.

Les hêtres du col de Saint-Pierre (Haute-Corse)

Suivons Yannick hors de Bretagne pour découvrir des hêtres anémorphosés.

« Sisley nous avait fait découvrir le hêtre du col de Vergio en Haute-Corse [1], et je pense qu’il aurait certainement chaussé ses brodequins pour aller voir les hêtres sculptés par le vent, du col de Saint-Pierre (1452m) non loin du col de Vergio. »

« Il faut une heure et demi de marche (si mes souvenirs sont exacts…) pour les atteindre, en partant de la station de ski de Vergio en direction du lac de Nino via le GR20. »

« On a l’impression qu’ils ont fait de la mobylette sans casque, tant ils sont décoiffés ! Vraiment extraordinaire, et on se demande comment avec un tel vent, ils ont pu ériger un tronc. Malheureusement, une telle forme peut s’avérer dangereuse, en effet un des plus beaux spécimens a fini par se rompre sous le poids de la neige. »

« Plus loin, on trouve d’autres hêtres sur le versant abrité du vent, qui eux aussi souffrent de la neige, ils sont tous délabrés, écimés par les intempéries, une bien étrange ambiance au milieu de ces arbres qui luttent pour leur survie ! [2] »

Incroyable comme le vent peut façonner les arbres ! Merci pour ce nouveau reportage Yannick, avec le temps qu’il fait c’est bien agréable de publier des photos estivales corses… Des fagus qui luttent avec panache contre le vent, et qui rappellent vraiment celui présenté par Sisley l’an passé (étant distant de quelques kilomètres et situés aux mêmes altitudes, il y a fort à parier qu’ils subissent les mêmes assauts de la météo).

Le Hêtre des Roches, Saint-André-sur-Sèvre (Deux-Sèvres)

Voici une nouvelle trouvaille de notre ami Yannick en Deux-Sèvres…

« Depuis longtemps déjà, je recherchais un hêtre Deux-Sévrien digne d’être présenté sur le blog. Et comme disait le poète : un seul Hêtre vous manque et tout est déboisé ! » [1]

« Donc, comme je me morfondais au fond des bois de ne point trouver ce hêtre cher, vint le jour où je tombais sur une photo qui retint toute mon attention [2]. On pouvait y apercevoir plusieurs cépées, la légende indiquait une hauteur : 31m, et une estimation de leur âge : 300 ans. On y apprenait aussi qu’elles avaient résisté à la tempête de décembre 1999. Même si cette photo était de petite définition, elle me laissait malgré tout présager le meilleur. »

« Après avoir traversé une futaie de châtaigniers, j’arrive dans une clairière et là, j’aperçois ces hautes branches lisses et grises qui dominent les autres arbres. En m’approchant, je croise une souche morte (une des cépées de la photo) d’une circonférence de 4,40m. Celle-ci ne m’a pas attendu, mais ma déception est vite rattrapée par ce que je vais découvrir. Une vingtaine de mètres plus loin, un monstre difforme borde le chemin. Difficile de décrire cet hêtre à l’allure préhistorique, je pense que la base est une ancienne haie plessée. Elle me fait penser à ce que l’on trouve sur le mont Beuvray [3]. »

« De cette base, comme des bougies sur un candélabre, s’élèvent huit troncs jusqu’à une trentaine de mètres de haut. »

« Je ne sais que penser de ce drôle de truc tout tordu, tout boursoufflé, tout troué et tarabiscoté. J’ai l’impression d’y apercevoir les bestiaires de nos belles églises Romanes. »

« Cela forme un ensemble de 8,90m de circonférence. Mais, est-ce un seul pied, une cépée qui s’est ressoudée de partout ou alors plusieurs pieds d’une ancienne haie, difficile à savoir. La question ne m’empêchera pas de dormir, je suis tellement content d’avoir trouvé un hêtre Deux-Sévrien pour le blog. »

« Note : Ce hêtre se trouve dans un petit bois au dessus du hameau des Roches. Le bois est privé, mais apparemment les visites y sont tolérées si l’on respecte la nature et l’interdiction de garer ou d’entrer sa voiture dans le chemin. Ce qui est la moindre des choses. »

Et bien voilà, encore une fois tu places la barre bien haut, et pour la première fois avec un hêtre exceptionnel ! Merci pour ce nouveau reportage Yanick, non mais c’est quand même incroyable la concentration et la diversité des vieux sujets cachés dans la campagne des Deux-Sèvres. Ce fagus possède des formes hallucinantes, et me rappelle fortement les trognes mystérieuses qui composent l’allée des géants de la Bletterie [4], ou encore les queules du Mont Beuvray. Dans la même impasse que toi, je ne saurai dire s’il s’agit d’un ou plusieurs individus, ni même donner une estimation de l’âge… Stupéfiant !

Un Monde à part entre Hêtres et Gogants (Suisse)

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Bienvenue à Vous en Terre d’Orée ,
ici Chaque Arbre à Temps d’Histoire .
Il Faudrait l’An pour les Conter ,
Trouver les Mots emprunts d’Égards,
pour Hêtre à même en leurs Passés ,
De Plonger Hors en hauts Regards .

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En dessous des Aiguilles de Baulmes, entre 1200 et 1280 m d’altitude, sur les alpages « Les Naz », « Les Crébillons » et « Les Praz », vivent de nombreux arbres remarquables.

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Sur les Hauteurs
du Col de l’Aiguillon ,
un Bel Ensemble
à Chœur d’Alliance ,

Au Fil du Temps ,
en Quatre Saisons ,
se Dresse Hêtres et Sapins
en Résilience

Cette zone proche de la frontière Française, a subit de nombreuses activités du militaire Suisse. Beaucoup d’entre elles ont laissé des traces sur les arbres et dans la terre. L’endroit est d’ailleurs truffé de fortifications plus ou moins visibles.

L’alpage est très exposé aux vents et aux violents orages. Les hivers sont souvent rudes et longs et pendant l’été la terre peut manquer de l’eau.

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La Plaine au Loin était Souvenirs ,
à ma Mémoire un Découvert ,
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Ici les Ombres donnaient l’Entière ,
Tout la Mesure d’une Onde de Bien.

Parmi les vieux hêtres, sapins, érables et épicéas vivant sur ce flanc au sud des Aiguilles de Baulmes, presque tous ont subit des traumatismes pendant leur longue vie. Mais ils ont su surmonter les blessures plus ou moins graves puisqu’ils sont toujours ici. Cet endroit est devenu un lieu enchanteur malgré ou grâce à ses empreintes. Plusieurs arbres sont au moins deux fois centenaires et certains troncs on atteint des dimensions impressionnantes. On peut également observer de très vieilles souches aux Formes Sinueuses.

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Ancrés au Sol depuis les Temps , s’ouvrait une Arche sous le Couvert,

Huit Piliers d’Hors à la Lumière , de Fiers Gardiens d’un Monde Vivant ,

Nouaient des liens avec les Ans , Prenant chaque Jour un Bain en Mère ,

Au delà du Vain de vivre en Terre , l’Hêtre aimait bien s’ouvrir au Chant.

Tout en Ces Terres Fleure la Magie ,

Pour Celui en Esprit qui à Cœur en Essences.

Chaque vieil arbre surprend, enchante par la Voie, son chemin pour survivre. Beaucoup entre eux ont dû quitter le mode classique de croissance par des cernes concentriques en faisant apparaître des branches en des points inhabituels.

La mémoire des arbres est bien entendu faite d’empreintes et non de souvenirs. Cependant, certains faits troublants donnent à réfléchir. C’est le cas du comportement des suppléants sur les arbres sénescents.

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Le vieux hêtre de Sainte-Angèle-de-Monnoir (Québec)

Quotidiennement des dizaines de lecteurs québécois viennent se perdre sur le blog, cela fait longtemps que je voulais leur faire un clin d’œil en présentant un vieil arbre de chez eux. Pas facile d’y dénicher un reporter, mais au fil du temps des rencontre ont eu lieu grâce à internet, et des amis d’outre-Atlantique m’ont fait entrevoir leur magnifique patrimoine arboré.

« Ce hêtre à grande feuilles a reçu le titre de champion du Québec des Hêtres en 1994. »

« Comme tu le sais les hêtres sont des arbres de la forêt… donc ce spécimen est sûrement un vestige de la forêt et a donc vu le jour avant la fondation de ce village, Sainte-Angèle-de-Monnoir qui se situe à quelques 40 min au sud de Montréal. »

« Il dépasse sûrement les 300 ans et sa circonférence était de 415 cm en 1994. »

« La tempête de verglas de 1998 [1] lui a fait perdre quelques plumes comme chez tant d’autres arbres ! Il est creux en plusieurs endroits,  ses années de vie sont donc comptées. »

« C’est de loin le hêtre le plus fabuleux que j’ai eu la chance de voir à ce jour au Québec. À Laval au nord de Montréal il y a un boisé reconnu pour sa hêtraie avec des spécimens de plus de 200 ans. Il s’agit du boisé Papineau qui fut épargné du défrichage. En effet le sol y est sablonneux et non propice à l’agriculture… le hêtre américain aime ce genre de sol… il s’agit là d’un dépôt de sable remontant à la mer de Champlain il y a plusieurs milliers d’années. Sainte-Angèle-de-Monnoir se situe en plein cœur de la vallée du Fleuve Saint-Laurent, laquelle fut aussi sous cette mer ! »

Merci d’avoir accepté de nous faire découvrir ce hêtre vétéran Charles ! C’est un vieil arbre fatigué, on voit qu’il a lourdement subit les outrages du temps au fil des siècles, un ancien forestier devenu solitaire avec l’avancée de la « civilisation », néanmoins il porte en lui la mémoire de l’ancienne forêt disparue, et veille sur les âmes des morts de ce village.

Charles tient un blog où il expose aquarelles et dessins « d’un pèlerin pour qui les arbres sont des balises d’éternité ! », faites donc un tour c’est par ici.

Charles collabore à une page Facebook sur les arbres remarquables du Québec, à voir ici.
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Le hêtre d’Anglesqueville-les-Murs, Saint-Sylvain (Seine-Maritime)

Avec Alexis, découvrons un hêtre accolé à une ancienne glacière, souvenir d’anciennes pratiques qui jusqu’à la fin du XIXè siècle, permettaient de produire et de stocker de la glace.

« L’arbre présenté ici est un arbre singulier, et je ne lui connais pas d’égal, ni dans la région ni ailleurs. Il s’épanouit dans une pâture, juste à côté du château d’Anglesqueville-les-Murs à Saint-Sylvain, auquel il était autrefois rattaché de par sa fonction. Car ce qui entre tous les autres le rend remarquable, indépendamment de son port magnifique, est la présence entre ses racines d’une ancienne glacière. Le château fut bâti entre la fin du 17ème et le début du 18ème siècle, tandis que la glacière et l’arbre sont légèrement plus récents. »

« Cet ensemble encore harmonieux malgré les assauts du temps est ce qui reste d’une pratique tombée en désuétude qui consistait à conserver de la glace dans des endroits prévus à cet effet, et ceci afin de pouvoir réfrigérer les plats. » (voir fin d’article)

« Il s’agissait de trous profonds (huit à dix mètres ici) dans lesquels on amassait et tassait de la neige quand la météo était propice. Ces trous aux parois maçonnées étaient recouvert soit d’un monticule de terre, soit, comme c’est le cas ici par un ou plusieurs arbres dont la fonction était d’apporter une ombre protectrice et rafraichissante, garantie de longue conservation pour la glace entreposée plus bas. »

« Sur la deuxième photo, située au-dessus de ces lignes, on peut voir la petite entrée qui jadis constituait le seul accès à la glacière, car il faut imaginer que cette dernière était surmontée d’un dôme en maçonnerie dont il ne subsiste quasiment rien à ce jour. »

« Il y a mon sac à dos, à droite de l’entrée, qui permet de donner une indication d’échelle, car je confesse que je n’ai pas mesuré la circonférence de l’arbre, d’abord parce que l’entreprise est périlleuse, et aussi parce qu’elle me semble compliquée, étant donnée la conformation particulière de l’arbre. »

« D’ailleurs je parle d’un arbre, mais il me faut dire qu’à l’origine ils étaient deux au moins, et que l’un d’entre eux est mort. Il n’a pas été abattu de peur de déséquilibrer la structure de l’ensemble, qui peut apparaitre sous certains angles comme légèrement bancale, depuis que le dôme disparu ne joue plus le rôle de soutien qui a dû être le sien dans le passé. »

« D’un autre coté je ne suis sûr de rien, sinon qu’il est déstabilisant de contempler un trou béant là ou d’ordinaire on se plait à imaginer que les racines de l’arbre s’enfoncent loin dans la terre, lui assurant ainsi un ancrage puissant. »

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