L’arbre huluppu

L’arbre huluppu n’est pas clairement défini comme un arbre de vie, néanmoins il est une figure centrale de la tablette XII de l’Épopée de Gilgamesh. Un arbre (un saule, un peuplier ?) choisit par Innana, une déesse majeure, puis replanté dans son jardin sacré.

Malgré tous mes efforts, il m’a été impossible de retrouver une représentation de cet arbre, l’article est donc illustré avec trois représentation d’Inanna où la végétation joue un rôle primordial.

« Le texte de Gilgamesh, Enkidu et les Enfers débute par un prologue de vingt-sept lignes dont le contenu n’a rien à voir avec la suite ; les treize première lignes fournissent de très importantes précisions sur l’idée que se faisaient les Sumériens de la création et de l’univers, tandis que les quatorze autres décrivent le combat livré au monstre Kur par le dieu Enki. Vient alors le récit proprement dit : »

« Un petit arbre huluppu croissait au bord de l’Euphrate, qui le nourrissait de ses eaux. Un jour, le vent du sud l’attaqua sauvagement, et le fleuve submergea l’arbuste. Inanna, la déesse, l’emporta en sa ville d’Uruk. Elle le planta dans son jardin sacré et le soigna du mieux qu’elle put, car elle avait l’intention, une fois qu’il aurait grandi, de tirer de son bois un siège et un lit. »

Inanna chevauchant un lion - arbre de vie - sceau cylindre Mésopotamie - 2350 avant notre ére

« Des années passèrent, et il finit par devenir grand. Mais lorsque Inanna voulut l’abattre, elle s’en trouva fort empêchée : le Serpent avait fait son nid au pied de l’arbre, l’oiseau Imdugud avait installé ses petits au sommet, et Lilith avait construit sa maison dans les branches. Ce que voyant, la jeune déesse, d’habitude si gaie, se mit à verser des larmes amères. »

« Le lendemain quand le dieu du soleil Utu, son frère, sortit à l’aube de sa chambre, elle lui raconta en pleurant ce qui était advenu de l’arbre huluppu. Sur ces entrefaites, Gilgamesh, ayant sans doute entendu ses doléances, vint à son secours de chevaleresque façon ; il endossa son armure, qui pesait cinquante mines ; et avec sa hache, qui pesait sept talents et sept mines, il tua le Serpent. Épouvanté, l’oiseau Imdugud s’envole à tire-d’aile vers la montagne avec ses petits ; quand à Lilith, elle s’enfuit dans le désert sans demander son reste. Alors aidé par les hommes d’Uruk qui étaient venus avec lui, Gilgamesh abattit l’arbre et le donna à Inanna, afin que, de son bois, elle tirât un lit et un siège comme elle en avait l’intention. »

« Mais il faut croire que la déesse avait changé d’idée ; elle se servit du tronc de l’arbre pour faire un pukku (sans doute une sorte de tambour) et, avec l’une de ses branches, elle fit un mikku (une baguette de tambour). » Lire la suite

L’arbre d’Eridou – Le Kiskanu

Quelques précisions pour compléter l’article sur les arbres au Proche-Orient ancien [1].

« Nous ne donnerions pas ce morceau s’il n’avait pas été de mode en ces dernières années de le regarder comme un prototype des descriptions de l’Éden ou de l’Arbre de Vie. Il s’agit tout simplement d’un arbre sacré qui croît près du temple d’Eridou et dont les rameaux possèdent des vertus magiques. »

« La ville d’Eridou joue un rôle prépondérant dans les formules magiques. Siège du culte d’Ea, le magicien des dieux, elle possède son incantation spéciale. C’est l’incantation d’Eridou.
Il y a aussi l’arbre sacré d’Eridou, et c’est le kiskanu dont les vertus thérapeutiques seront attestées. On voit qu’il y avait plusieurs sortes de kiskanu : le blanc, le noir, le brun. Le lieu saint est l’emplacement du sanctuaire, comme dans la cosmogonie chaldéenne. »

Arbre Eridou 1 - Choix de textes religieux assyro-babyloniens - E. DhormeArbre Eridou 2 - Choix de textes religieux assyro-babyloniens - E. Dhorme

Choix de textes religieux assyro-babyloniens – Edouard Dhorme, 1881 [2].
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L’arbre Kiskanu

Le moment de ce passage du « lieu sacré » image du microcosme à un Arbre cosmique, conçu en même temps comme « habitation » de la divinité, est admirablement conservé dans une incantation babylonienne que les orientalistes ont souvent traduite :
« Dans Eridu a poussé un Kiskanu noir, en un lieu saint il a été créé ; Son éclat est celui du lapis-lazuli brillant, il s’étend vers Vapsu. C’est le déambulatoire d’Ea dans l’opulente Eridu, Sa résidence est un lieu de repos pour Bau… »

L’arbre Kiskanu présente tous les caractères de l’arbre cosmique : il se trouve à Eridu, donc dans un « centre du monde » ; dans un endroit sacré, c’est-à-dire dans le centre du réel ; il ressemble par sa splendeur au lapis-lazuli, symbole cosmique par excellence ; il s’étend en direction de l’océan qui encercle et soutient le monde (faut-il comprendre que cet arbre s’étend en direction de l’Océan avec le bout de ses branches, c’est-à-dire que cet arbre est un « arbre renversé » comme le sont d’habitude les arbres cosmiques ?) ; il est la demeure du dieu de la fertilité et des sciences civilisatrices (arts, agriculture, arts de l’écriture, etc.) ; il est l’endroit de repos de la mère d’Ea, la déesse Bau, divinité de l’abondance, des troupeaux et de l’agriculture.

Kiskanu peut être considéré comme l’un des prototypes de l’« arbre sacré » babylonien, dont la fréquence dans l’iconographie de l’ancien Orient est significative. Que l’«arbre sacré» que l’on rencontre dans ces régions signifie plus qu’un simple « culte de l’arbre », qu’il ait un sens cosmologique bien précis, la position qu’il occupe dans l’espace iconographique le prouve abondamment. L’arbre est presque toujours accompagné de symboles, d’emblèmes ou de figures héraldiques qui en précisent et complètent la valeur cosmologique. […]

Aucun des emblèmes qui accompagnent l’arbre ne peut être interprété dans un sens naturiste, et ceci pour la simple raison que, dans la conception mésopotamienne, la « Nature » était elle-même tout autre chose que dans l’expérience et dans la conception modernes. Il suffit de nous rappeler, par exemple, qu’aucun être ni aucune action significative n’acquiert son efficacité – pour les Mésopotamiens comme pour l’homme archaïque en général – que dans la mesure où la chose a un prototype céleste et où l’action répète un geste cosmologique primordial.

Mircea Eliade – Traité d’histoire des religions, p.278-279.

Assyrian cylinder - worship of sacred tree

Cylinder, From Soldi ; Assyrian Cylinder : Worship Of Sacred Tree. New York Public Library.

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Assyrian Homa, Or Sacred Tree ; Tree Of Life, Assyrian. New York Public Library.

La fin du déluge – Noé, la colombe et la branche d’olivier

Élohim se souvint de Noé, de tous les animaux et de tous les bestiaux qui étaient avec lui dans l’arche. Élohim fit passer un vent sur la terre et les eaux s’apaisèrent. Alors se fermèrent les fontaines de l’Abîme et les écluses des cieux, l’averse des cieux fut retenue, les eaux revinrent de dessus la terre, allant et revenant, et les eaux décrurent au bout de cent cinquante jours.
Au septième mois, au dix-septième jour du mois, l’arche se reposa sur les monts d’Ararat. Les eaux allèrent en décroissant jusqu’au dixième mois. Au dixième mois, le premier du mois, apparurent les sommets des montagnes. (Genèse VIII, 1-5)

Au bout de quarante jours, Noé ouvrit la fenêtre de l’arche qu’il avait faite et lâcha le corbeau. Celui-ci sortit allant et revenant jusqu’à ce que les eaux fussent séchées de dessus la terre. Puis il lâcha d’auprès de lui la colombe, pour voir si les eaux avaient diminué de la surface du sol. La colombe ne trouva pas d’endroit où reposer la plante de son pied et elle revint vers lui dans l’arche, car les eaux étaient sur la surface de toute la terre. Il étendit sa main, la prit et la ramena vers lui dans l’arche.
II attendit encore sept autres jours et recommença à lâcher la colombe hors de l’arche. La colombe vint à lui, au temps du soir, et voici qu’en sa bouche il y avait une feuille d’olivier toute fraîche. Alors Noé sut que les eaux avaient diminué de dessus la terre. II attendit encore sept autres jours et lâcha la colombe, mais elle ne revint plus vers lui. (Genèse VIII, 6-12)

Manuscrit Hs 2505, folio 5rDove Returns with an Olive Branch (artiste et année inconnus)

En l’an six cent un, au premier mois, au premier jour du mois, il advint que les eaux s’étaient desséchées de dessus la terre. Noé écarta la couverture de l’arche et regarda. Or, voici que la surface du sol était desséchée. Au deuxième mois, au vingt-septième jour du mois, la terre était sèche.
Élohim parla à Noé, en disant : « Sors de l’arche, toi et ta femme, tes fils et les femmes de tes fils avec toi.  » Fais sortir avec toi tous les animaux qui sont avec toi, de toute chair : oiseaux, bestiaux, et tous les reptiles qui rampent sur la terre. Qu’ils foisonnent sur la terre, qu’ils fructifient et se multiplient sur la terre! ». Noé sortit donc, ainsi que ses fils, sa femme et les femmes de ses fils avec lui. Tous les animaux, tous les oiseaux, tous les reptiles qui rampent sur la terre, selon leurs familles, sortirent de l’arche.
Noé bâtit un autel à lahvé, il prit de toutes les bêtes pures et de tous les oiseaux purs, il fit monter des holocaustes sur l’autel. lahvé sentit l’odeur apaisante et lahvé dit en son cœur : « Je ne recommencerai plus à maudire le sol à cause de l’homme, car l’objet du cœur de l’homme est le mal, dès sa jeunesse, et je ne recommencerai plus à frapper tout vivant comme je l’ai fait :
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Tous les jours que la terre durera,
Semailles et moisson, froid et chaud,
Été et hiver, jour et nuit
Point ne cesseront. (Genèse VIII, 13-22)

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L’arbre au Proche-Orient ancien : deux conceptions ~ Florence Malbran-Labat

Alors que je cherchais difficilement à assembler et à traduire des documents pour présenter le motif de l’arbre de vie chez les anciennes civilisations du Proche-Orient, je suis tombé sur une étude intéressante menée par Florence Mabran-Labat (phililogue et chercheur émérite au CNRS). Par la suite, viendront des articles détaillés sur les arbres kiskanu et huluppu.

« Le  Proche-Orient  qui  appartenait  dans  l’Antiquité  à  ce que  l’on  pourrait  appeler  le  « monde  cunéiforme  »    partagea pendant  près  de  trois  millénaires  suffisamment  de  traits  communs  pour  constituer  une  civilisation  propre.  Le  système graphique particulièrement complexe véhiculait en fait un mode très spécifique de penser et d’appréhender le monde. Cependant cette  civilisation  connut  des  caractéristiques  locales  liées  aux substrats  ou  à  des  données  propres,  comme,  par  exemple,  les données  écologiques.  Ainsi  le  type  de  la  végétation  oppose nettement  la région du Tigre et de  l’Euphrate et à ses pourtours montagneux.  C’est  en  effet  une  banalité  que  de  rappeler combien  la  Mésopotamie  était  pauvre  en  arbres  et  devait recourir,  pour  ses  constructions,  à  l’argile  et  au  roseau.  En revanche  l’Elam et ses hautes vallées à  l’intérieur des monts du Zagros  comportaient  des  zones  très boisées,  avec des  forêts de conifères  denses  et  touffues.  On  comprend  donc  que  la conception de l’arbre en Mésopotamie et en Elam ait pu être très différente malgré  les  très  nombreux  échanges  et  influences qui unissaient ces deux pays voisins. »

« Dans  le monde  du  suméro-akkadien  se  développa  une double  conception de  l’arbre :  il y  avait  les  arbres  indigènes et les  arbres  « de  l’étranger  »,  d’autant  plus  désirables  qu’ils répondaient à des besoins précis ou à un idéal.
Il  faut  tout  d’abord  noter  que  la  vision  paradisiaque transmise  par  la  tradition  biblique [1] à  propos  de  la  région  du Tigre et de l’Euphrate est bien loin de la stricte réalité botanique. Le  terme  d’Eden  qui  lui  est  donné  est  d’ailleurs  révélateur puisqu’il désignait, dans la langue vernaculaire, non pas un lieu de délices mais  la steppe aride qui commençait  là où s’achevait le  territoire cultivé  ; c’était  l’espace des nomades étrangers à  la civilisation des villes. Le « croissant fertile »  devait, quant à lui, sa richesse à un intense travail humain et ce n’est que grâce à un système  d’irrigation  très  développé  et  exigeant  que  la  plaine mésopotamienne put produire d’abondantes récoltes. Les  arbres  les  plus  familiers  pour  les  Sumériens,  puis pour  les Assyro-Babyloniens  étaient  sans  doute  une  variété  de peuplier qui poussait  sur  les bords de  l’Euphrate et  le palmier-dattier qui  faisait  la  richesse du sud-babylonien. L’un et  l’autre apparaissent dans la littérature locale la plus ancienne. »
« C’est  en  effet  autour  du  peuplier [2] que  fut  bâti  un  des épisodes  sumériens de  l’Epopée de Gilgamesh,  le  roi mythique de la ville d’Uruk : « Gilgamesh, Enkidou et l’Enfer ». Il débute par  la  plantation,  au  bord  de  l’Euphrate,  d’un  arbre-huluppu. Déraciné par le vent du sud, il est récupéré par la déesse Inanna qui  le  replante  car  elle  veut,  quand  le moment  sera  venu,  s’en faire un siège et un lit. Mais, lorsque la croissance de l’arbre lui permettrait de mettre son projet à exécution, elle a la désagréable surprise  de  découvrir  qu’il  est  la  demeure  d’un  serpent,  d’un aigle  et  d’une  démone.  Gilgamesh  vient  alors  à  l’aide  de  la déesse qui, reconnaissante, lui donne un morceau de l’arbre pour qu’il s’en  fasse une Baguette et un Cerceau [3]. Mais ces  insignes de  la  royauté tombent  dans  les  enfers,  sans  que  Gilgamesh puisse les reprendre. Son serviteur Enkidou, qui a accepté d’aller les y chercher, est retenu au royaume des Morts, sans espoir de retour. Gilgamesh  obtient  seulement  du  dieu  des Enfers  qu’un orifice  soit  aménagé  par  lequel  le  fantôme  d’Enkidou  pourrait sortir, une seule fois, et raconter à son ami la triste condition des défunts. On le voit ce mythe est étroitement rattaché à la fois à la sphère divine, au  thème du pouvoir et à une évocation d’un au-delà fait d’ombre, de poussière et de misère. » Lire la suite

L’Arbre de Vie – شجرة الحياة‎ (Bahreïn)

Un jour qu’on rêvait à de vieux arbres lointains,  Yanick avait évoqué un arbre légendaire « l’Arbre de Vie » qu’il aimerait bien voir arriver sur le blog. Localisé en plein cœur du désert de Bahreïn, la difficulté consistait à trouver un reporter capable de nous envoyer photos et mesures de cet arbre. En fouillant sur le net, j’ai fait la rencontre de Maldita, une blogueuse Bahreïnienne qui a volontiers accepté de devenir reporter arboricole.

Cet arbre s’épanouit dans le désert où presque aucun autre signe de vie n’est visible…

L’Arbre de Vie – شجرة الحياة‎  (Bahreïn) 2L’Arbre de Vie – شجرة الحياة‎  (Bahreïn) 3

Des discussions se sont engagées [1] pour savoir comment cet arbre fait pour survivre dans un tel milieu, mais aussi pour déterminer l’espèce : s’agit-il d’un Prosopis cineraria ou d’un Prosopis juliflora ? Les Prosopis peuvent avoir des racines extrêmement profondes capables d’atteindre de façon permanente les couches de sol humide. Prosopis juliflora peut s’épanouir et fructifier même si les eaux souterraines sont salées (salinité équivalente à 75% d’eau de mer). Sa deuxième source d’eau réside dans la condensation de l’humidité de l’air durant la nuit lorsque les feuilles ouvrent leurs stomates. Bahreïn bénéficie d’un très haut taux d’humidité de l’air toute l’année. (clic les photos)

L’Arbre de Vie – شجرة الحياة‎  (Bahreïn) 4

“Malheureusement, ma dernière visite à l’arbre fut un peu décevante. Puisque c’est l’un des sites touristiques de Bahreïn, et comme il n’y a rien d’autre à voir à proximité, l’arbre est largement visité, mais sans aucun respect : les visiteurs gravent leurs noms sur le tronc, mais pire ils utilisent des bombes de peintures pour taguer l’arbre ! C’était vraiment un triste spectacle. Les branches sont abaissées (peut-être dû en partie aux gens qui y grimpent). Je me suis aussi sentie coupable de grimper sur l’arbre, même si nous ne sommes restés que sur les branches inférieures qui avaient déjà la plus grande partie dans le sol, contribuant ainsi à soulager notre poids.”

L’Arbre de Vie – شجرة الحياة‎  (Bahreïn) 5L’Arbre de Vie – شجرة الحياة‎  (Bahreïn) 6

“Nous avons escaladé la clôture, et mesuré le tronc de l’arbre : 148 inches (3,76m circ).”

Merci pour la découverte de cet arbre mythique Maldita, car il s’agit bien d’une merveille de la nature. Tout seul en plein désert depuis environ quatre siècles, où trouve-t-il l’eau et la force pour résister au soleil et aux vents brûlants du désert ? Une réponse est contenue dans le nom donné localement : “l’arbre de vie” – la légende veut qu’il pousse sur le lieu de l’Éden sumérien, ses racines iraient chercher l’eau du puits des origines…

Maldita écrit un blog (en anglais) où vous pourrez découvrir Bahreïn, mais aussi la culture et l’art de vivre des femmes arabes, rendez-lui visite, c’est par ici.
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Comme Bahreïn est la localisation de l’Éden sumérien Dilmun, je saute sur l’occasion pour revenir sur cette histoire fort ancienne… Entre le Tigre et l’Euphrate, des hommes fondèrent la civilisation de Sumer (6è millénaire av. JC). Les Sumériens perfectionnent l’écriture, les bateaux, l’art de bâtir en briques, la roue, l’école, la démocratie, la justice, la monnaie, les impôts et la médecine. Ils fondent des cités avec un prêtre-roi. Ce sont eux qui ont inventé le système sexagésimal de l’heure, la minute et la seconde…

La religion sumérienne a influencé l’ensemble de la Mésopotamie pendant près de 3000 ans, ainsi que les onze premiers chapitres de la Bible (il existe des parallèles évidents).

C’est un sujet qui est parfois polémique, afin de ne créer aucune tension, je citerai Samuel Noah Kramer, assyriologue américain, spécialiste de Sumer et de la langue sumérienne.

L’histoire commence à Sumer, chapitre 22. Paradis Lire la suite

Le chêne de Sherdanu

Après avoir présenté le chêne de Mambré et le chêne de Moréh, continuons la relecture des Textes de façon ‘arboricole’. Trouvé un passage intéressant dans le Vetus Testamentum, l’auteur nous conte quelques chênes légendaires de la Bible, puis nous emmène sur la trace du chêne de Sherdanu, que la Tradition ougaritique ramènerait à des temps encore plus anciens ; un peu technique, mais pertinent.

Élément caractéristique de la religion  “patriarcale” [1] –  autant plus caractéristique qu’il  pourrait remonter  à une  stratification ancienne, antérieure à la réinterprétation iahwiste des  rédacteurs –  est  le  rôle de  ces  grands  arbres dont  le  nom  ‘elôn est  peut-être  générique mais certes  à rapprocher de celui du chêne  ‘allôn  [2]. Ces grands arbres, qui se  levaient  isolés  (ou en groupes  isolés)  dans un paysage à pâtures et maquis [3], étaient  en gré à  attirer  l’attention  des pasteurs  (qui bien volontiers  se reposaient sous  leur ombrage), et  à stimuler  la fantaisie et  les  contes populaires. Ce  n’est pas  par  hasard  qu’ils  portent des noms qui les individualisent  en rappelant des histoires  ou des personnages  légendaires  qui  pour nous  sont  désormais  en grande  partie perdus.

Chez Hébron  il y avait  le groupe  des  « chênes  de Mamré » (‘elônê mamré)  [4],

Abram transporta sa tente et vint habiter aux chênes de Mambré qui sont à Hebron. Il y bâtit un autel à Iahvé. (Genèse, XIII, 21)

qui était  un personnage  légendaire,  “l’Amorite Mamré, frère d’Eshkol  et d’Aner,  les alliés d’Abram” [5].

Un fuyard vint l’annoncer la chose à Abram, l’Hébreu. Celui-ci demeurait aux chênes de Mambré, l’Amorhéen, frère d’eshkol et d’Anér. Ceux-ci étaient des alliés d’Abram. (Génèse, XIV, 13)

Chez Sichem il y avait  le  chêne  ou  les  chênes  de  Moréh  (‘elôn/’elônê  môreh)  [6],

Abram traversa le pays jusqu’à la localité de Sichem, jusqu’au chêne de Moréh. Le Cananéen était alors dans le pays. (Génèse, XII,6)

Ne sont-ils pas au delà du Jourdain, derrière la route du couchant, au pays du Cananéen qui habite dans la Arabah, face au Guilgal, à côté des chênes de Moréh ? (Deutéronome, XI, 30)

c’est-a-dire  de  l’instructeur  ou  semblable,  identique  peut-être au “chêne  des  évocateurs (d’esprits)”  (‘elôn mê’ônênîm)  [7] ;

Gaal, recommença alors à parler et il dit : « Voici un peuple qui descendent du côté du nombril de la terre et un corps qui arrive par la route du chêne des Augures ! » (Juges, IX, 37)

et  il  y  avait aussi le  “chêne  du (poste  de) garde” (‘elôn mussâb)  [8].

Tous les bourgeois de Sichem et toute la Maison du Terre-plein se rassemblèrent et ils allèrent proclamer comme roi Abimélech près du chêne de la Pierre Dressée qui est à Sichem. (Juges, IX, 6)

Chez Béthel  il y avait le  “chêne  des pleurs”  (‘allôn bâkût)  [9] ;

Alors mourut Débora, la nourrice de Rébecca, et elle fut mise au tombeau au-dessous de Béthel, sous le chêne qu’on appela du nom de Bakouth (Pleur). (Génèse, XXXV, 8]

entre Béthel  et Gaba’a  le ‘elôn tabôr [10],

De là tu iras plus loin, et tu arriveras au chêne de Thabor, où tu seras rencontré par trois hommes montant vers Dieu à Béthel, et portant l’un trois chevreaux, l’autre trois gâteaux de pain, et l’autre une outre de vin.

chez  Qadès  le  ‘elôn bêsa’ânannîm  [11].

Or Hébér, le Quénite, s’était séparé de Qayin, des fils de Hobab, le beau-frère de Moïse, et il avait tendu sa tente jusqu’au chêne de Sannaïm. (Juges, IV, 11) Lire la suite