Frênes du Petit Chalet, Angers (Maine-et-Loire)

Retrouvons Gilles pour une nouvelle enquête sur les frênes têtards [1][2][3].

« À proximité du platane monumental de l’île Saint-Aubin [4], on découvre sur les berges de la Mayenne un groupe de frênes très intéressants. Reflets des pratiques traditionnelles de taille en têtard qui ont cours dans cet environnement humide où les frênes rejettent vigoureusement de souche (photos et mesures qui datent de mars 2010). »

« Je me suis rendu sur place juste après la décrue de la rivière c’est pourquoi la base des arbres apparaît en marron sur les photos. On peut juger de l’importance de la crue en visualisant la hauteur de boue déposée sur l’environnement. La petite route qui longe la rivière était d’ailleurs barrée car elle avait été elle aussi inondée. »

« Première découverte, un frêne sans véritable tronc. Il s’agit plutôt d’une base enflée sur laquelle ont repoussé maintes et maintes fois des rejets suites aux nombreuses tailles. »

« Cette « boule de bois » de moins d’un mètre de haut mesure tout de même 4m90 de tour. »

« En continuant j’ai retrouvé le frêne qui m’avait fait revenir sur les lieux. Je l’avais remarqué lors de ma première visite auprès du platane en me promettent d’y retourner. Pas facile de le mesurer car il borde un fossé rempli d’eau. Mais je m’en suis bien tiré en découvrant sur mon décamètre la belle mesure de 5m35. »

« Cette trogne est très régulièrement entretenue et elle est couverte de nombreuses repousses qui lui promettent un bel avenir. Un arbre en pleine forme qui ne déplore que peu de cavités, vestiges d’ancienne branches coupées un peu trop grosses et un peu trop au raz du tronc [5]. »

« La suite a confirmé mon analyse. Alors que je m’attardais pour prendre des clichés de cet arbre, un homme qui avait garé son véhicule un peu plus loin s’est approché de moi. Nous nous sommes salués et j’ai découvert qu’il s’agissait tout bonnement du propriétaire de l’arbre et de la parcelle de terrain attenante située entre le gros têtard et la rivière. »

« Il craignait au départ que je sois un sordide marchant de bois venu faire des repérages afin de proposer un vil prix pour la coupe de certains de ses frênes qui en valaient effectivement bien la peine. Pour lui, les plus gros têtards de sa parcelle étaient du patrimoine et non de la simple matière première. Je l’ai aussitôt rassuré en lui expliquant le fond de ma démarche et il m’a donc ensuite autorisé à poursuivre plus avant l’exploration de son lopin. »

« Dans le fil de la conversation, j’ai eu la chance d’avoir un cours sur la pratique de la taille en têtard. L’homme m’a ainsi montré quelques exemples de tailles ratées pratiquées dans du bois plus anciens et non sur la dernière repousse. Cette dernière taille fut conduite à peine 5 ans auparavant. On peut donc juger de la vigueur des repousses ! »

« Il m’a également ouvert les yeux sur la parcelle de terrain attenante qui est jalonnées de fûts coupés tantôt au raz du sol, tantôt à environ 1m de haut. Cette exploitation, il venait de la faire en hiver. On est là face à un exemple parfait de la première étape pour conduire un peuplement entier de frênes en têtard. En m’approchant, j’ai constaté un âge d’environ 30 ans pour 1m de circonférence. »

« Cette incursion m’a emmené jusqu’au bout du pré pour y mesurer un second arbre séculaire de 5m20 de circonférence à 1m30. Son houppier a une forme plus classique et homogène que le précédent arbre mais il possède une grosse cicatrice verticale qui semble cependant ne pas lui porter le moindre préjudice au vu des bourrelets cicatriciels importants. Un bel arbre qui se referme. Il est possible qu’à terme on ne suspecte même plus ce traumatisme. »

« Du point de vue de l’âge, même si l’information collectée sur les jeunes têtards en devenir est précieuse, et indiquerait environ 156 et 160 pour ces deux arbres, et même si leurs cicatrisations indiquent un développement actuel assez important, je pense que la conduite aussi régulière en têtard ne peut que ralentir cette croissance en diamètre et j’estimerais donc plutôt 220 et 225 ans. »

« Où est donc la vérité ? Entre les deux ? On ne peut que supposer. Mais grand merci encore une fois à ce propriétaire, qui comme bon nombre d’autres possesseurs d’arbres en prend soin et les respecte en tant que patrimoine vivant. »

Merci pour cette nouvelle incursion en pays des têtards Gilles, encore une fois tu nous a déniché de beaux fraxinus. Et grâce à la rencontre fortuite que tu as faite, le reportage n’en est que plus passionnant et instructif. C’est génial de pouvoir déambuler ainsi dans une parcelle destinée à un futur peuplement de têtards, tu pourras ainsi suivre son évolution au fil du temps… veinard !
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Sur le blog, des dossiers sur les arbres têtards à découvrir par ici.

11 réflexions sur “Frênes du Petit Chalet, Angers (Maine-et-Loire)

  1. Si j’ai bien compris les arbres tétards sont provoquer par des coupes volontaires
    mais je ne comprend pas pourquoi, il me semble que cela enleve la beauté des arbres du moins de cette facon

    1. Arrigo

      C’est une tradition très vielle , à l’époque on taillait les frênes , saules , érable etc. en têtards pour récupérer le bois pour chauffer , piquets pour clôture…..
      On taille les branches tous les 5 ans et ils repoussent , on avait du bois à bon compte ……
      Idéalement un arbre taillé en têtard devrait être entretenu tous les 5 ans , autrement le houppier trop volumineux peut briser la trogne (tronc) et l’endommager gravement !
      Ces trognes sont très favorable pour la faune ( oiseaux , chauve-souris…..) qui trouve des cavités et des abris et de la nourriture .

        1. Arrigo

          Autres avantages d’élaguer les trognes (ou têtards ) dans une haie , c’est l’ombre !
          Un arbre élagué fait peu d’ombre et les cultures poussent d’autant mieux!

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  3. Merci Gilles, une belle flopée de frêne en trognes !!

    Les deux plus gros sont déjà des sujets très imposants, récemment j’ai compter 180 cernes pour 4,30 m de tour sur un frêne de parc ayant poussé en concurrence.
    C’est impressionnant la longévité d’une trogne entretenu, on ne se douterait guère d’un tel contraste avec des individus en port libre..

  4. Salut Gilles,
    Heureux de te revoir mettre le pied à l’étrier. Une belle brochette de frênes. Sur la 6ème photo, je ne comprend pas trop, est-ce la hauteur à laquelle les têtards sont coupés ? Je trouve cela bien bas. Et certains ont étés coupés à ras du sol. De plus leur section à déjà l’air assez importante. N’auront-ils pas du mal à repartir ?

  5. martine

    Oui, comme nuage 1962, je me demande pourquoi couper ces arbres et ne pas les laisser pousser en toute liberté? En seraient-ils fragilisés?

    Merci pour cet excellent reportage.

    1. Je pense qu’on pratique la méthode de la cépée de production, un peu comme un taillis forestier où l’on vient tous les 8 -12 ans afin de récupérer les brins destinés à faire du bois de chauffage.

      Si l’on laisse certains repartir en port libre, il faudra néanmoins les surveiller pour voir si des branches seront à supprimer afin de ne pas trop solliciter l’ancrage du rejet qui est toujours plus fragile qu’une pousse initiale.

  6. Damien

    Le dernier présenté est mon favori, j’en ai vu un à Maucomble qui lui ressemble mais qui ne mesurait environ que 3m de tour.
    Petit frêne têtard deviendra bientôt Krapo 😉

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