Alisier torminal et chênes pédonculés, forêt de Sarralbe (Moselle)

Retour en Lorraine, et plus particulièrement en Moselle, accompagnons Sisley pour une sortie forestière dans le pays de l’Albe. (clic les photos)

Voici bien des années que je côtoie la forêt domaniale Saint Hubert, dans la périphérie de Sarralbe. Un vaste territoire de 550 ha dans lequel j’ai tout de suite était ravi de voir la multitude de sentiers à thèmes qui sont proposés : le circuit des chênes, le sentier des mardelles, un jeune petit arboretum fort riche en essences indigènes et d’ailleurs, tels que : néfliers, sorbiers, amélanchiers et résineux en tout genre…

« Les espèces dominantes sont le chêne pédonculé, le sessile, le hêtre et le charme, mais en nombre bien plus restreint vient aussi se montrer l’alisier torminal. Un jour alors que je vadrouillais en lisière occidentale, je pus découvrir un ancien îlot de vieillissement partiellement remis à la régénération naturelle, ce fut certainement un encouragement pour la suite, car finissant le contour, je fis une rencontre inopinée. »

« A quelques dizaines de pas, je reconnu cette écorce particulière et cette forme de houppier. La découverte fut grandiose, cet arbre avait tout d’un noble sujet de futaie,

je pense que sa réussite demeure dans l’emplacement reculé où il se trouve, près d’une lisière où les arbres s’élèvent moins haut et lui ont ainsi permis de maintenir une croissance convenable. Les dimensions : une circonférence de 2,06 m de tour à 1 m/ 2 m de tour à 1,50 m et 23 m de hauteur (+/- 1 m) et une estimation d’âge de l’ordre de 110-160 ans. Cela en fait un spécimen qui se démarque bien : un tronc droit dépourvu de branches sur 9 m, une cylindricité assez soutenue et une frondaison équilibrée. »

« C’est le deuxième que j’ai réussi à faire entrer dans la forêt du blog et je sais par expérience que ce n’est pas chose aisée. L’alisier est une espèce post-pionnière qui arrive sur des zones faiblement colonisées et profite du maximum de lumière ses premières années. C’est pourquoi en rencontrer des gros et haut en pleine forêt n’est pas courant. Il arrive qu’un jeune soit surcimé pendant toute sa vie et qu’un jour, une coupe ou un arbre tombé lui ramène à nouveau la lumière, c’est seulement à ce moment qu’il pourra reprendre une croissance correcte (ex: des individus de diamètres 15-20 cm avaient 100 ans ). Les critères de maintien qui portent en sa faveur sont qu’il produit des baies appréciées par la faune et des arbres matures sont gardés en tant que semenciers où après récolte des graines, elles seront mélangées à d’autres, conférant ainsi un brassage génétique où de vrais caractères d’adaptation en forêt pourront se révéler. »
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« Pour ne pas s’arrêter en si bon chemin, partons découvrir la grande travée des chênes. »

« Le tout commence par un beau spécimen, c’est un arbre mort depuis des lustres qui tient les pieds dans l’eau au bord d’une mardelle, il possède 3,85 m de tour. Ensuite on passe devant un hêtre aux formes tourmentées tel un ‘fou’, un exemplaire atypique qui présente des troncs partant en torsades. Puis vient un arbre appelé le chêne Haltier, qui avec un haut tronc droit et un houppier fourni, affiche un tour de 3,74 m pour 26-28 m de hauteur. »

« Sa base est constitué de renforts imposants, preuve qu’il s’est tout de suite adapté au condition du milieu. 200 m plus loin, arrive un autre, nommé le ‘chêne enlassé’, un sujet qui se distingue par une fusion irrégulière de deux branches voisines. Un arbre assez singulier. »

« Et enfin, pour le bouquet final, le rideau se lève sur un spécimen tout à fait de taille. Pour la petite histoire, alors que par une matinée pluvieuse d’octobre, j’explorais des parcelles qui m’étaient inconnues, je décidais de rejoindre un axe principal par des passages très peu empruntés et après avoir débouché dans des zones denses de jeunes hêtres et de fougères, je pus apercevoir un frondaison au loin, qui vu de là où je me trouvais, se démarquait fortement. Très intrigué, je m’approchais donc, et une fois à proximité après que deux renards s’esquivèrent des lieux, je me rendis compte du magnifique chêne se dressant haut dans les cimes. Celui-ci dit le ‘chêne des gnomes’, porte bien son nom, tant l’endroit où il se trouve à quelque chose de particulier, difficile à décrire. »

« 3,83 m de périphérie, une taille s’élevant entre 29 et 34 m et certainement plus de deux siècles d’existence. Il est difficile de dire qu’il est le plus vieux de la forêt, car probablement que d’autres le collent de près, mais au point de vue des dimensions, je pense qu’il est le plus gros du domaine. Bien que ce soit une forêt d’exploitation, une grande majorité des parcelles, sont préservées et abritent de belles choses. »

« Localisation sur le plan / rond jaune : alisier / rouge : chêne des gnomes / mauve : hêtre ‘fou’, chêne de la mare, Haltier et Enlassé / bleu clair : arboretum. »

« Il existe d’autres chênes mis en valeur dans la forêt dont quelques uns figurent sur le blog des cistes de Sylza [1], mais j’ai pas réussi à mettre la main dessus. »
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Liens pour en apprendre plus sur l’alisier :

La cueillette à des fins alimentaires (confiture, distillation,..) en Autriche [2]
L’alisier dans le Bassin parisien, plateau Lorrain et Allemagne du Sud-Ouest [3][4]
Et des études complètes sur cette essence [5]
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Merci pour cette balade sylvestre Sisley, quel plaisir de marcher dans tes pas à la rencontre des arbres qui se distinguent dans cette forêt. Comme tu le soulignes, c’est seulement le deuxième alisier qui rejoint le blog ; par ici l’essence est bien présente mais je n’ai pas encore trouvé d’individus ayant de telles dimensions, mais je cherche encore ! Enfin les trois chênes dévoilés sont intéressants : l’enlassé avec sa forme singulière, et les deux droits & élevés qui veillent sur la forêt.

27 réflexions sur “Alisier torminal et chênes pédonculés, forêt de Sarralbe (Moselle)

  1. Yanick

    Salut Sisley,

    Belle découverte cet alisier, y’ a que toi pour en trouver de cette taille !!!
    ça serait chouette d’en avoir une photo en début d’automne quand les
    feuilles prennent cette teinte rouge vif incomparable.
    J’aime bien aussi le chêne enlacé.
    Merci pour la ballade.

  2. J’en ai vu quelques spécimens dans le parc du Martreil, mais tout petits. Je ne connaissais pas bien l’alisier torminal, ça m’a donné l’occasion d’observer les feuilles de près. Merci de focaliser sur cette essence.
    En ce moment, on ouvre petit à petit de nouvelles rubriques, c’est didactique! Bien joué!

  3. Sisley

    Oui, cet alisier est une réelle surprise, je rêve de trouver de très vieux exemplaires.
    Sur la p.17 du lien 3 indiqué dans l’article, on peut voir une petite liste d’individus insolites, qui sont présents en Meurthe et Moselle.

    Les feuilles sont magnifiques, mais c’est vrai qu’a l’automne, ça pourrait être tout droit sorti d’un tableau.
    ………………..
    Oui, ça devient didactique, les espèces sortent bon train.
    Pour l’instant, on a ‘sorbus domestica’ et ‘torminalis’. Je pense encore pouvoir dénicher ‘aria’, ‘aucuparia’, ‘latifolia’ et ‘intermedia’.

    Quelques sorbus en France :

    Cliquer pour accéder à les-sorbus-en-france-caracteres-botaniques-et-generalites.pdf

  4. Stphane Grenoble

    Bonjour,
    flicitations pour cet alisier torminal. La seule commune de mon dpartement o l’arbre est rpertori est attenante Grenoble (au pied du Vercors), mais on y trouve seulement de micro alisiers chtifs. On se demande d’o viennent les graines qui ont fait ces petits sujets. Pas non plus de plante mre l’horizon, au cas o il s’agirait de drageons. Bref je m’arrache les cheveux depuis bientt deux ans….
    Il y en a aussi un beau, moiti cach dans un arboretum, en fleur en ce moment d’ailleurs, mais il ne doit avoir qu’une vingtaine d’anne….
    Je n’ai jamais vu de sujets comme celui prsent ici.
    Pourtant l’arbre semble pousser facilement lorsqu’on le favorise. J’en ai plant 4 depuis l’anne dernire et la croissance cette anne semble tre assez forte. Des pousses de 3 ans environ qui ont presque doubl de hauteur depuis un mois.
    Rassure-toi Sisley, les deux sorbiers que tu as dj observ sont les deux plus difficiles trouver. S.aria et s.aucuparia sont beaucoup plus communs.
    D’ailleurs j’ai quelques surprises maintenant que j’ai (enfin) un appareil photo. Ici il y a aussi beaucoup de sorbus amelanchier (ovalis medicus), qui, a l’tat de cpe forme parfois de trs gros buissons.
    On en oublierait presque les chnes qui pourtant sont galement de trs belles trouvailles.
    Merveilleux en tous cas….

  5. Sisley

    Merci,

    C’est une espèce que j’apprécie particulièrement, car plus discrète, très plastique en terme d’adaptation, et possédant un esthétique singulier.
    D’après une revue forestière, il est question d’un jeune alisier torminal en port libre âgé de 19 ans et qui a déjà un diamètre de tronc de 28 cm.
    Donc quand les conditions sont bonnes, la croissance peut s’avérer être vigoureuse.
    …..
    Je ne connaissais pas ovalis medicus, intéressant.
    Comme tu es dans le proche Vercors, tu dois certainement voir pas mal des autres espèces de sorbus en altitude. Notamment, aria, aucuparia et chamaemespilus. J’avais vu un beau sorbier des oiseleurs de diamètre 45-50 cm au bord d’un chemin forestier entre Rousset en Vercors et le Grand Veymont.

  6. Ping : Index pour les chênes « Krapo arboricole

  7. Sisley

    Voilà quelques exemples de l’exploitation de l’alisier torminal en forêt :

    (voir les photos)

    Cliquer pour accéder à regeneration-dalisier-torminal-un-reseau-de-placettes-a-30-km-de-notre-dame-de-paris-en-foret-regionale-de-ferrieres-seine-et-marne.pdf

    On voit bien qu’on fait un effort pour promouvoir l’espèce, néanmoins les vieux sujets ne sont que très rarement épargnés. On abat des spécimens de diamètre 55-65 cm et pourtant ils ont déjà un bel âge.
    Si ils pouvaient laisser ne serait-ce que le 1/4, on retrouverait quelques reliques en forêt !!

  8. Sisley

    J’ai appris par l’intermédiaire d’un courrier envoyé à l’onf dans commune meusienne, que les plus gros alisiers mesurant de 80 à 90 cm de diamètre ne seraient plus de ce monde !!
    Je n’en sais pas plus, mais j’imagine que la plupart on du être exploités, plutôt effarant quand on sait que des spécimens comme eux, sont d’une rareté sans nom !!

    Si un habitant de Bagneaux (Yonne) ou un visiteur passe par là, sachez qu’il existe un alisier de diamètre 90 cm dans le bois de Bagneaux (coordonnées Lambert 696/2363)entre Villeneuve l’archevêque et Planty.

    1. Grasset

      Tu savait que sa coute 4000milles euros le ster en bretagne
      donc c’est un bois noble j’ai des petit plans cher moi et j’espere quil vont devenir a 1 diametre de 90 cm mais bon faut que je les entretienne jen ai une 12 aine de petit alysier dans mon jardin

      1. Yanick

        Si c’est réellement ce que ça vaut, ça risque d’encourager certains à rechercher ceux qui restent encore debout plutôt que d’en replanter. Comme avec beaucoup de choses l’argent n’a jamais fait bon ménage avec les arbres.
        Ça en fait donc une essence dont il serait préférable de ne pas donner les localisation précises.
        Au moins 6000€ pour celui présenter sur ce reportage, si ça, ça attire pas les convoitises !!!

  9. Sisley

    Je ne préfère pas entrer dans le discours du marchand de bois, mais ce qui me rassure avec l’alisier présenté, c’est qu’a partir d’un certain diamètre, de l’âge avancé et des noeuds présents dans le troncs du à un élagage naturel des basses branches, la dépréciation joue un rôle protecteur.

    Comme j’ai pu lire, l’association franco-allemande dans la sylviculture de l’alisier prône le côté économique et cynégétique de l’espèce.
    Seulement contrairement à l’Allemagne, qui est plus accès dans la conservation et l’étude forestière, la France recherche beaucoup plus l’aspect financier, car effectivement certaines billes sans défauts peuvent atteindre des sommes considérables, mais il est très important de bien considérer les choses et de garder sur pied des semenciers dits remarquables pour d’un côté garder un patrimoine génétique varié et conserver par la même occasion des sujets qui deviennent aujourd’hui d’une rareté sans précédent.

    Alors oui pour la culture en mixte de l’alisier, mais que la récolte soit gérée de manière durable.

    On a trop tendance à exploiter un gros bois car on voit tout de suite sa valeur, or une fois à terre, c’est un individu de moins dans la catégorie des exceptionnels, il faudrait plutôt réserver en coupe des arbres de 40 à 55 cm de diamètre bien élevés et veiller à garder toutes les classes d’âges de façon homogène.

    1. Grasset

      exactement ta raison les gens vont passer leur temp a les chercher ses arbres rares
      pour se faire de l’argent mais tu serai ou quil yen a autrement moi je sais qui yen a plein en bretagne mais bon apres yen a ptete pas que la

  10. Sisley

    En fait c’est très variable, l’alisier affectionne les milieux ouverts, en espèce pionnière il s’y fait une place puis si il arrive à se développer suffisamment pour concurrencer les charmes, hêtres, chênes et autres feuillus, on arrivera à avoir des arbres souvent de taille moyenne, 15-20 m.

    On le trouve quasiment dans tous les départements de France, plus sur sol calcaire et dans des sols pas trop engorgés.
    Du midi où il est très résistant à la sécheresse aux régions humides du nord-est et jusqu’en Bretagne.
    Selon les différents types de gestions forestières, on trouvera facilement ou non des alisiers, mais quand il est implanté, il se reproduit bien par drageons, du coup à partir d’un arbre mère, on arrive parfois à une dizaine d’individus dans un rayon de 50 m.

    1. Sisley

      On dit toujours que la pomme tombe jamais bien loin de l’arbre, ben dans mon cas, je suis une pomme qui est restée accroché à la branche pour ne plus la quitter !

      Content de t’avoir renseigné.

  11. C’est assez bizarre que tu sortes ce lien, car elle montre l’arbre en vue d’ensemble, il s’agit bien du même individu !! 😉

    La photo du tronc date de septembre 2000, il s’agit du plus volumineux du pays.

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