Les hêtres de Reinhardsmunster, forêt domaniale de Saverne (Bas-Rhin)

C’est reparti pour une incursion forestière nord-vosgienne avec Sisley, et cette fois, il sera question d’arbres dont l’insolite leur a donné une très grande renommée dans leur contrée.

« Pendant la journée du 29 mai dernier, alors que je consultai l’article de la Chaire des druides, Kerohou [1], Maël-Pestivien, j’y ai déposé un commentaire dans lequel je disais qu’un jour j’en présenterai un similaire et tu n’étais pas loin de détenir le fin mot de l’histoire, c’est pourquoi compte tenu de ma promesse passée, je me dois aujourd’hui de vous faire rencontrer un arbre dans la magnificence n’a d’égal dans cette catégorie ! »

« Accompagné de Francis lors de la sortie de Schoppenwihr [2], nous avions d’abord fait un crochet par un endroit que j’apprécie fortement (si je l’ai montré à Francis, c’est d’abord Jérem qui me l’a fait visiter il y a de cela quelques années), un massif forestier grimpant doucement vers les contreforts des Vosges et bien entendu, un arbre d’exception. »

« Dès ma première rencontre je fus fasciné par cette grâce sylvestre, tant d’équilibre entre le minéral et le végétal, un spectacle de la persévérance que peut délivrer un arbre tout au long des décennies qui passent. A première vue, ce hêtre à germé sur ce bloc de grès rose et s’est progressivement accaparé en se nourrissant de la pauvre litière disponible dans les creux de la roche jusqu’à avoir développé suffisamment de racines pour explorer le sol en contre-bas, cette bataille à dû durer des années et des années. »

« Mais le résultat est stupéfiant et si maintenant quelques 130 ans après avoir vu le jour ce hêtre est si fringuant ce n’est pas sans avoir enduré les caprices de la nature. »

« Une circonférence de 2,31 m pour un beau tronc moussu élancé jusqu’au début d’un houppier fin et régulier s’élevant à 23 m, il faudrait peut-être soustraire la hauteur du rocher à cette taille, le hêtre perché nous mets dans l’embarras ! »

« L’arbre vit au bord d’une route forestière longeant un cours d’eau, nommée la Baerenbach (ruisseau des ours), très plaisant à observer, une eau pure glissant sur le grès désagrégé et évitant les roches obstacles pour rejoindre la Zorn, coulant à côté du canal de la Marne au Rhin au travers de Saverne. »

• « En remontant au nord, on peut rejoindre le village de Reinhardsmunster par le biais d’un circuit routier assez complexe, mais une fois les carrefours bien négociés, on approche d’un dernier et c’est ici que dans l’accotement se tient une relique dans le monde des hêtres, cet arbre appelé ‘Billebaum’ est en quelque sorte un témoignage du genre d’individu qu’on pouvait trouver dans ce massif forestier, mais une violente tempête l’allégea d’une grosse charpentière en 1989 et c’est peu de temps après que des hommes durent intervenir pour abattre l’arbre devenu trop dangereux de par son instabilité et la proximité de la route. »

« Un bien triste évènement quand on sait que le hêtre en question était âgé d’au moins 300 à 350 ans à cette époque. Il avait tout d’un patriarche avec ses 6,13 m de tour de tronc et aujourd’hui il ne reste plus qu’un tronçon d’environ 3 m de hauteur recouvert d’un toit préservant le bois de la pluie. On peut se consoler en se disant qu’avec un tel âge, il avait sans doute parcourut un très long chemin pour un hêtre de forêt. »

« J’ai retrouvé un dessin de lui, reproduit par Henri Ulrich en 1988 dans le livre « Arbres, 50 dessins inédits : Du réel au transfiguré, une approche éthique », une vraie chance qu’il ait eut l’idée de lui tirer le portrait car un an plus tard c’était fini. »

« Un arbre qui rentrera sans aucun doute dans les chroniques des spécimens d’autrefois ! »

« Il y a encore bien d’autres, mais ce sont d’autres essences, d’autres lieux pour d’autres découvertes… Voilà, l’histoire du hêtre minéral et du hêtre logis reliquat est terminée. »

(p.s : l’emplacement du ‘Billebaum’ est approximatif à 300 m près)

Génial ! Merci pour cette promenade sylvestre l’ami, c’est un vrai plaisir d’accueillir enfin sur le blog ces deux hêtres fantastiques, dont la renommée a largement dépassé les frontières de leur propre département. Je suis toujours époustouflé des alliances entre les arbres et la pierre, là le spectacle est réellement saisissant, une fusion minéral-végétal digne des plus beaux contes de faërie, superbe ! La souche du Billebaum est également impressionnante avec ses 6 mètres de tour, quel arbre cela devait être du temps de sa gloire !

6 réflexions sur “Les hêtres de Reinhardsmunster, forêt domaniale de Saverne (Bas-Rhin)

  1. De la Roche pour s’élever
    Il a fait sa Compagne
    L’Hêtre proche , une Aimée
    Un haut Socle d’approche,
    Pour une Quête par Ciel.
    Ses Racines lui assurent,
    Une emprise Ephémère.
    Les beaux verts d’une Mousse,
    Tout une Onde de Murmures.
    Un doux chant de la Terre,
    Veille sur l’Hêtre Essentielle,
    Alliant l’Arbre et la Pierre.
    Sous l’Attrait d’un Soleil.
    NéO~

    http://drenagoram4444.wordpress.com/

  2. Richet sébastien

    Ce genre de hêtres aux racines exubérantes est extraordinaire. Ils offrent un spectacle saisissant. Je ne me risquerais pas à leur donner un âge car comment savoir combien d’année ils ont vécu en tant que « bonzaï »? Lors des étés secs, qui était là pour les arroser ? Ils ont peut être vue la mort de prés, mais ils ont lutté jusqu’à ce que leurs racines vainquent le minéral. Ils nous laissent une belle leçon de courage. Aujourd’hui, leur croissance est probablement toujours ralentie même si de grosses racines ont atteint un sol beaucoup plus riche.
    Aussi les hêtres patriarches de nos forêts de France qui dépassent les 6 mètres de circonférence sont vraiment rares. J’ai bien peur qu’on puisse les compter sur les doigts de la main. J’espère me tromper…

    1. Sisley

      L’indication de l’âge du premier hêtre provient d’un registre Onf, ils se sont surement basé sur l’historique de l’arbre de par des témoignages et des archives forestières, car cet endroit est connu depuis des lustres.
      Pour le deuxième, il est bien vrai que ces spécimens de forêt sont éparpillés ça et là, il existe encore des endroits de montagnes et des forêts de plaine où les hêtres peuvent croîtrent librement et si ils n’atteignent pas les 6 m, on arrive à en trouver de plus de 5 m.

      Je pense notamment à la sylve d’Iraty (> 400-500 ans), à la forêt de Bonsecours-France (C :4,85-6 m/ 46-48 m) et aux zones moins connues.

  3. Ping : La Chaire des Druides, Kerohou, Maël-Pestivien (Côtes d’Armor) – Krapo arboricole

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