Les métamorphoses d’Ovide : Cyparissus

Au milieu de cette forêt qu’on vit obéissant au charme des vers, parut aussi le cyprès, verdoyante pyramide, jadis jeune mortel cher au dieu dont la main sait également manier l’arc et la lyre.

Dans les champs de Carthée errait un cerf fameux consacré aux Nymphes de ces contrées. Un bois spacieux et doré orne sa tête ; un collier d’or pare son cou, flotte sur ses épaules ; attachée par de légers tissus, une étoile d’argent s’agite et brille sur son front. À ses oreilles pendent deux perles éclatantes, égales en grosseur. Libre de toute crainte, affranchi de cette timidité aux cerfs si naturelle, il fréquente les toits qu’habitent les humains. Il présente volontiers son cou aux caresses d’une main inconnue.

Mtamorphoses d’Ovide : Cyparissus

Mais qui l’aima plus que toi, jeune Cyparissus, le plus beau des mortels que l’île de Cos ait vu naître ? Tu le menais dans de frais et nouveaux pâturages ; tu le désaltérais dans l’eau limpide des fontaines : tantôt tu parais son bois de guirlandes de fleurs ; tantôt, sur son dos assis, avec un frein de pourpre, tu dirigeais ses élans, tu réglais sa course vagabonde.

C’était vers le milieu du jour, lorsque le Cancer aux bras recourbés haletait sous la vapeur brûlante des airs. Couché sur le gazon, dans un bocage épais, le cerf goûtait le frais, le repos, et l’ombre. Cyparissus imprudemment le perce de son dard ; et le voyant mourir de cette blessure fatale, il veut aussi mourir. Que ne lui dit pas le dieu du jour pour calmer ses regrets ! en vain il lui représente que son deuil est trop grand pour un malheur léger. Cyparissus gémit, et ne demande aux dieux, pour faveur dernière, que de ne jamais survivre à sa douleur.

Cependant il s’épuise par l’excès de ses pleurs. De son sang les canaux se tarissent. Les couleurs de son teint flétri commencent à verdir. Ses cheveux, qui naguère ombrageaient l’albâtre de son front, se hérissent, s’allongent en pyramide, et s’élèvent dans les airs. Apollon soupire : « Tu seras toujours, dit-il, l’objet de mes regrets. Tu seras chez les mortels le symbole du deuil et l’arbre des tombeaux ».

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L’illustration « Cyparissus ab Apolline in arborem commutatur », Apollon transformant Cyparissus en cyprès est d’Antonio Tempesta, publiée à Anvers en 1606.

Cyparisse est changé en cyprès – Illustrations de La Métamorphose d’Ovide figurée – Bernard Salomon – 1557.

14 réflexions sur “Les métamorphoses d’Ovide : Cyparissus

  1. Tiens, jadelame repasse par ici…

    Étonnant les métamorphoses d’Ovide, depuis que j’ai découvert ce livre, je ne me lasse pas de découvrir ces belles histoires chargées de symbolisme, qui ont traversé les siècles jusqu’à nous. Mais nous nous sommes tellement éloignés de la Nature, que ces mythes sont peu à peu devenus des coutumes…

    La métamorphose en végétal permet d’atteindre le Paradis sans passer par les Enfers, et d’être assuré d’un renouveau toujours vert, l’immortalité…

    A bientôt

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