Oh, mes amis !

« Là-bas, dans l’Altaï, je vivrais dans l’isba la plus basse et la plus sombre, tout au bout du village, près de la forêt. J’irais dans la forêt – non, pas chercher du bois ni des champignons, comme ça, simplement, et je serrerais un tronc d’arbre dans chaque bras : oh, mes amis ! Je n’ai besoin de rien de plus ! »

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Alexandre Soljenitsyne, « L’Archipel du goulag », tome 1, première partie, chapitre 6 – Ce printemps-là, 1973.
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Vieux pins de Sibérie en Altaï. Crédit photo © A. Brukhanov.

Rendez-vous pareils à l’arbre

« Voyez l’arbre devant votre porte,
Il laisse les oiseaux se brancher ou s’envoler.
Quand ils viennent à lui, il ne les a pas appelés,
Quand ils prennent leur vol, il ne les retient pas.
Rendez-vous pareils à l’arbre ;
Vous n’irez pas contre la Voie. »

Lung-ya kiu-tun (835-923), disciple de Tung-shan, le fondateur de l’école Ts’ao-tung (Sôtô). Cité par Jacques Brosse dans son ouvrage « L’esprit du zen », chapitre III, Le tch’an et la poésie.

Moine Myoe - Enichibo Jonin - 13e siecle

Le moine Myōe pratiquant zazen (méditation assise) au cœur d’un pin vénérable nommé Nawadoko, situé non loin du temple de Kōzan-ji où le moine est venu se retirer pour les dernières années de sa vie.

Peinture sur rouleau 13e siècle – attribuée à son disciple, le moine Enichibō Jōnin. Trésor national japonais, conservée au Temple Kōzan-ji.

Le suprême présent

« Longtemps, les dons que recèle la terre demeurèrent ignorés, et les arbres et les forêts passaient pour le suprême présent qu’elle eût fait à l’homme. C’est l’arbre qui lui fournit ses premiers aliments, c’est son feuillage qui rendit la caverne plus moelleuse, c’est de son écorce qu’il se vêtit. »

Pline l’Ancien, Histoire naturelle, Livre XII,1.

Carmina Burana - BSB Clm 4660 - folio 64v

Carmina Burana, manuscrit BSB Clm 4660, folio 64v (la forêt). Conservé à la MDZ (Münchener DigitalisierungsZentrum).
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La popularité du recueil connut un regain au XXe siècle grâce au vif succès de l’œuvre musicale homonyme de Carl Orff, Carmina Burana.

Carl Orff – Carmina Burana « O Fortuna » – le morceau d’ouverture.

L’Orchestre de Chambre de Genève sous la direction de Jonathan Griffith (DCINY, New York). Enregistré le 5 octobre 2019 à l’Auditorium Stravinski de Montreux (Suisse).

Nos différences

Oak at Wormingford © Noel Myles« Mais il y a aussi une communauté de l’espoir qui justifie notre appel. Cette communauté est assise sur des réalités contre lesquelles nous ne pouvons rien. […] Ces hommes doivent vivre ensemble, à ce carrefour de routes et de races où l’histoire les a placés. Ils le peuvent, à la seule condition de faire quelques pas les uns au-devant des autres, dans une confrontation libre. Nos différences devraient alors nous aider au lieu de nous opposer. Pour ma part, là comme partout, je ne crois qu’aux différences, non à l’uniformité. Et d’abord, parce que les premières sont les racines sans lesquelles l’arbre de liberté, la sève de la création et de la civilisation, se dessèchent. Pourtant, nous restons figés les uns devant les autres, comme frappés d’une paralysie qui ne se délivre que dans les crises brutales et brèves de la violence. C’est que la lutte a pris un caractère inexpiable qui soulève de chaque côté des indignations irrépressibles, et des passions qui ne laissent place qu’aux surenchères. »

Albert Camus « Appel pour une trêve civile en Algérie ». Conférence prononcée à Alger, le 22 janvier 1956. Actuelles III. Chroniques algériennes, 1939-1958, Les Éditions Gallimard 1958, p. 92.
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« Oak at Wormingford » une composition photographique de Noel Myles, issue de la série Still Films.

La selva infinie

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« Les senteurs de la jungle l’enivraient. Dans le jeu des rayons du soleil qui filtraient à travers le feuillage de la canopée, des papillons Morpho, d’un bleu métallique iridescent, virevoltaient sans un bruit avec d’autres Heliconidae et Papilio. Le claquement de bec des toucans, le chant des hoazins et le battement d’ailes des colibris créaient un tumulte de sons. Le tronc sur lequel il s’appuyait n’était qu’un enchevêtrement de différentes plantes, et il compta jusqu’à huit sortes de feuilles sur ce qui, au premier coup d’œil, ressemblait à un seul arbre. »

Gert Nygårdshaug, La trilogie de Mino, tome 2 : Le crépuscule de Niobé, p. 121.
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Un morpho bleu, Parc National Madidi, Bolivie. © Joel Sartore, 2021.